Chers compatriotes,
C'est une question qui hante tous les esprits par ces temps de crise: le jour où l'Etat fera faillite, que se passera-t-il? Cela paraît virtuel, voire impossible. Et pourtant… La crise de la Grèce a donné une petite idée aux Européens de la réalité de ce scénario catastrophe. Pris de panique, ils ne savent plus quoi faire pour éviter la contagion.
Plus près de nous, Français d'Amérique, se joue une autre tragédie. Selon un article du New York Times intitulé "A little state with a big mess", l'Etat du Rhode Island serait au bord de la faillite… Les fonds de pension de cet état – le plus petit des Etats-Unis - n'ont tout simplement plus d'argent en caisse. Ou du moins plus assez pour honorer les promesses faites aux retraités de la fonction publique, policiers, pompiers, enseignants et autres, et pour assurer les services essentiels de l'état. Alors, les chèques des retraités arrivent tronqués, les bibliothèques ferment leurs portes, le ramassage scolaire se raréfie. Découragés par les 10,6% de chômage ambiant (1,5 points de plus que la moyenne nationale), les actifs partent chercher du travail dans les états voisins, les riches plient bagage. Il n'y a plus grand monde à taxer… Quant à la petite ville de Central Falls, à sec, elle s'est tout bonnement placée sous la protection du Chapitre 11. Ce sera sans doute la première d'une longue liste. Et le Rhode Island n'est pas le seul état dont les finances font peur.
Quand l'Etat fait faillite, que se passe-t-il? Demandez aux habitants de Little Rhodie. Certains sont en colère, certains essaient de se raisonner en se disant qu'il vaut mieux toucher moins que ne rien toucher du tout. Une chose est sûre: ils ont appris à leur dépens qu'on ne pouvait pas tout attendre de l'Etat.
En quoi cela peut-il concerner la France vous vous demanderez ? Tout simplement parce que pendant des décennies, tout comme les citoyens du Rhode Island les Français ont vécu sur un nuage, persuadés que l'Etat-providence était un puits sans fond. Aujourd'hui, il faut regarder les chiffres en face: la France cumule une dette publique de plus de 1 650 milliards d'euros, soit autour de 86% du PIB, le déficit public pour 2011 est prévu à 5.7% du PIB… L'exposition de la France aux dettes italienne, grecque, espagnole et irlandaise est la plus importante d'Europe… La France sera la première à en payer lourdement les frais si ces pays font défaut. Sur le papier, la situation des retraites est encore plus fragile que la social security aux Etats-Unis, car la France a un système organisé non pas par capitalisation, mais par répartition. Autrement dit, ce sont les travailleurs actifs, et eux seuls, qui portent sur leurs épaules le poids des retraites. Aux Etats-Unis, un fonds spécifique sert à alimenter la social security. Combien de temps encore les travailleurs actifs en France pourront-ils faire face à cette pression croissante? Le jour où les classes d'âges issues du baby boom partiront à la retraite, le système deviendra de plus en plus difficile à soutenir; toutes les projections mathématiques le disent. Et dire que les socialistes veulent revenir à la retraite à 60 ans...
Chers compatriotes, si ce n'est pas déjà fait, allez vous inscrire sur les listes électorales pour les élections présidentielles et législatives qui vont avoir lieu en 2012. Vous aurez alors à faire un choix important: celui de regarder en face la réalité, si douloureuse soit-elle, et agir en conséquence, ou alors de prolonger le "rêve français", selon la formule électorale de François Hollande… Un rêve qui pourrait être doux s'il n'était pas irréaliste, voir dangereux..
Je compte sur vous.
Bien à vous,
Richard Ortoli,
conseiller élu à l'Assemblée des Français de l'étranger
